[Série] Nos étudiants ont du talent, épisode 1. Parcourir 3 000 km en kayak pour rejoindre le Cap Nord, parmi certains courants les plus rapides au monde, il fallait le faire. C’est pourtant avec décontraction, beaucoup de sourires et zéro esbroufe que Pierre-Louis Spatz et Adrien Piccitto, 24 ans, évoquent leur exploit, marqués avant tout par l’expérience humaine et les belles rencontres.
Lorsqu’on leur propose à boire, on s’entend répondre qu’« un verre d’eau, ça suffira ». Et on comprend vite qu’avec l’eau, l’histoire de Pierre-Louis et Adrien est particulière. Plutôt étonnant, pour deux Alsaciens… « On pense d’ailleurs que c’est ce décalage qui a autant suscité d’engouement autour de notre projet », soulignent-ils, comme surpris du succès de leur folle aventure.
Autre paradoxe : partis pour « quitter les gens et les voies toutes tracées » – « le schéma emprunt-maison-voiture, c’est pas pour nous », encore moins les discours angoissés de leurs proches sur leur avenir – ils reviennent de ces sept mois de voyage, gonflés des souvenirs de « rencontres incroyables ». Aussi bien celle avec ce couple d’iliens Norvégiens leur ouvrant grand la porte de leur maison alors qu’ils ne partagent que quelques mots d’anglais, que de tous ces animaux, « renard polaire, phoque, baleine », croisés sur la route.
Aventuriers autant que fêtards
A l’origine de ce voyage, il y a une amitié, simple, naturelle, quasi-fraternelle, « débutée en maternelle et renouée au lycée », à la faveur d’une rencontre « en boîte de nuit ». Aventuriers tout autant que fêtards, ils se découvrent et alimentent une passion commune pour les bivouacs, les randonnées en peau de phoque dans les Vosges ou les road trips irlandais. Il y a deux ans, germe l’idée de la grande aventure : « Partir jusqu’au Cap Nord en kayak de mer ». Adrien est alors étudiant en aménagement à la Faculté de géographie et d'aménagement, Pierre-Louis enchaîne les contrats en maintenance après un passage à la Faculté de physique et ingénierie.
Ils n’ont pas particulièrement le pied marin ? « C’est vrai que jusqu’à présent, on s’était contentés de petits tours sur la rivière de notre village de Biesheim (Haut-Rhin) ! » Qu’importe, ils vont apprendre, enchaînent les stages, dans les calanques de Marseille et sur les côtes bretonnes, pratiquent sans relâche, apprennent la météo, à lire les cartes de navigation. Une complicité à toute épreuve, doublée d’une motivation sans faille, sans oublier l’immédiate sympathie qu’ils suscitent partout, font le reste. « Les gens ont été incroyables, nous aidant à financer notre voyage sans qu’on leur ait parfois rien demandé ! » Ainsi des collègues du stage de kayak breton, dont la cagnotte leur permet de s’offrir les conseils des meilleurs spécialistes, ou de ce commerçant de Colmar qui déroge pour eux à sa règle de ne jamais accepter de sponsoring.